Mon héritage-le premier amour de ma vie
Silencieux et taciturne, mais toujours disponible Mon père n’a jamais manqué à sa mission de paternel. En ce matin de novembre où je lui ai donné mon dernier baiser Je me suis sentie volée, vidée… La vie pour moi n’avait plus de sens. Plus rien ne me retenait sur cette terre. J’ai cru qu’il était temps : je pouvais aller le rejoindre. Plus personne n’avait besoin de moi. Je constatais avoir beaucoup donné autour de moi. Cela… toujours parce que je voulais que mon père soit fier de sa fille ainée. Et voilà qu’il était parti… Mon rôle était-il fini? Une petite voix intérieure, celle de ma première enfance Criait si fort : “Douleurs !” que j’ai dû m’arrêter et me soigner.
J’ai alors, pris conscience de qui était mon père … Je le vois comme un tout petit coffre de bois avec un loquet secret. Pas beaucoup de personnes en connaissaient l’existence. Il a peut-être l’air bien ordinaire, Mais il renferme des trésors si bien gardés Qu’il m’a fallu le perdre pour l’apprécier. Pour me donner goût à la vie Je me suis mise à reproduire mon petit coffre imaginaire Sous toutes sortes de formes et fait de tous les matériaux possibles. Je les décorais de pierres précieuses, Les peignais de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. J’ai produit et produit… Je laissais tomber ces dessins par terre devant moi Jusqu’à en faire un tas. Une montagne de reproductions toutes plus uniques les unes que les autres, Toutes fidèles à l’image de mon père, l’homme que j’aimais. Pendant des jours, mon imagination inspirée S’est laissée aller à ce jeu. Puis vint un temps… J’ai été soulagée, rassasiée de l’image de mon père … Je me suis prise à deux mains, J’ai lancé les dessins aussi loin et aussi haut que j’ai pu Toujours devant moi, dans ma vie future. J’ai regardé les dessins tomber En prenant bien garde de ne pas déranger leur trajet Pour m’assurer de retrouver un peu partout dans ma vie Une parcelle de mon père. Croyez-le ! Maintenant, je me surprends à penser à lui Dans des moments tout à fait inattendus. Je sais alors … Il y est tombé là, un dessin de mon petit coffre imaginaire. Je me rappelle alors le premier homme de ma vie et je souris. J’aime et je me sens toute réchauffée de son souvenir.